Pas simple d'écrire sur Sarajevo. On y est resté que 3 jours et pourtant on a tellement de choses à raconter !

Pour ça, l'idéal serait peut-être de commencer par le début : notre arrivée catastrophique.

On a accumulé mauvais choix et mauvaise chance. Nous sommes partis de Jajce le matin, direction Travnik (où on a fait une super visite de la ville) avec pour objectif de dormir un peu plus loin, à Vitez (2h de route c'était pas mal à nos yeux pour la journée). Au final on se fait gentiment (mais surement) virer de notre campement "vitezien" (sur c'est comme ça qu'on dit ici). On se dit qu'on a cas aller plus loin, il parait qu'il y a un super spot au pied des pyramides de Bosnie... On repart pour 1h de route. Mais le "super spot" en question est déjà bien occupé par un camp de gitans. On leur fausse donc compagnie direction Sarajevo : allez c'est plus très loin au final (hahahaha ça c'était sans compter les 2 heures de bouchon). Du coup : on arrive à Sarajevo de nuit (erreur fatale n°1), fatigués par la route (erreure fatale n°2), sous la pluie (erreure fatale n°3 même si en vrai on pouvait pas trop y faire grand chose mais bon quand même).

On sait que le meilleur (presque le seul) endroit pour camper est en haut de l'une des collines qui borde la ville. On sait aussi que tous ceux qu'on a rencontré et qui y sont allés ont trouvé la route "terrible" voire "catastrophique" et qu'il ne faut pas trop se fier au gps (vous voyez surement venir notre erreure fatale numéro 4 : on a un peu trop suivi le gps...). Du coup, on finit par se retrouver dans une petite ruelle, à sens unique, sur une pente à quasi 45°, le camion cale, je (Camille) cri et pleure, Yoann gueule un bon coup et reprend rapidement son sang froid : mais en vrai on est tous les deux en pls.

Il y a une file de voitures derrière nous, il faut les faire reculer pour manoeuvrer (hyper pratique vu la largueur de la rue). On frole d'1 centimètre la carrosserie de la voiture d'un habitant, le camion est bloqué. La panique est à son paroxysme. Je vous laisse m'imaginer cripleurer dans la rue à Yoann, les mains sur le visage "je sais plus quoi faaaire, je sais pas pourquoi je t'ai dit de faire çaaa, si tu bouges on défonce sa caisse aaaaaaaah". Lorsque surgit notre sauveur. Le gars sort de sa voiture, il nous dit qu'il est conducteur de camions depuis 30 ans : il prend les choses en mains et 20 minutes plus tard (et tout autant de badauds plus tard) on sort enfin de notre traquenard avec le conseil ultime :" small roads small cars, bid roads big cars". On ne sait pas comment le remercier, ainsi que toutes les personnes qui sont venues pour voir (certes) mais aussi pour nous soutenir. On repart fébriles mais avec du baume au coeur.

On finit par trouver notre campement (bon en vrai là aussi on s'est trompé mais trop chiant à raconter) et au final on avait une place pour se garer et ENFIN nous reposer !


Le lendemain on part à la découverte de la ville. On descend à pieds et de jour, la colline du traumatisme : 30minutes de descente dans des ruelles à pique. Mais la vue est magnifique ! On découvre en premier le quartier Ottoman, ses échopes, ses terasses et ses cafés typiquement bosniens. Ca grouille de vie, de couleurs et de parfums. On mange un Cevapi dans le restau du club de foot de la ville et direction le musée des crimes contre l'humanité et du génocide (ouais direct comme ça, histoire de bien nous plomber le moral). En réalité et blague à part, c'était très important pour nous de comprendre ce qu'il s'est joué sur ce territoire ces dernières années. Personnellement, je ne savais pas réellement comment et pourquoi il y avait eu la guerre en Bosnie-Herzégovine dans les années 1990, ni quelle fut la nature des combats ou encore que les civils furent les plus touchés (120 000 civils tués, 200 000 déportés en camps de concentration, 2 millions de réfugiés...). On sort du musée le coeur très lourd, mais on a l'impression de repartir avec une pièce importante de la compréhension de l'histoire du pays.

Heureusement, le soir, notre hôte (Oliver) avait une amie qui venait fêter son anniversaire chez lui, ce qui nous a permis de remettre un peu de joie dans nos coeur :) C'était vraiment une superbe soirée. Imaginez, on arrive au camp, il y a une quinzaine de cinquantenaires qui boivent, mangent et chantent ensemble, sur la terrasse avec vue plongeante sur la ville (je vous ai dit qu'on était dans les hauteurs ? haha). On est chaleureusement invité à nous joindre à la fête, avec tous les autres campeurs. C'est impressionant, une grande partie des bosniens présents ont vécu la guerre et ont été réfugiés à l'étranger. Ils sont presque tous bilingue allemand, espagnol ou français. Celui qui parle français vient nous voir, c'est le portrait craché de mon beau-frère Jérôme (si tu passes par là Jé, j'ai beaucoup pensé à toi à cette soirée ;) ) et il a vécu une grande partie de son adolescence à Laval. C'est marrant. Ce sera lui le musicien de la soirée, il joue de la guitare, chante le blues et des chants balkaniques accompagné du reste du groupe.

Notre hôte a une histoire intéressante lui aussi. Il était propriétaire d'une boite de nuit avant 1992, et ce serait d'après les dires de ses amis le seul à avoir réussi à maintenir son club pendant la guerre. On nous a raconté des histoire avec des flingues et des grenades : le gars c'est un filou, on ne la lui fait pas. Aujourd'hui il fait du "business" avec Fabrice un français qu'il a rencontré dans son camping il y a quelques années. Ils achètent des vieux camions, les réparent à Sarajevo et les revendent en France. Après avoir vu l'envers du décors on vous déconseille tout de même l'achat de ce genre de véhicules (méfiez-vous du compteur kilométrique ;) ).


Sarajevo est vraiment une ville impressionnante. Elle porte le poids de son histoire dans ses rues, ses bâtiments et jusque sur ses murs où les impacts de balles nous empêchent d'ignorer ce qu'il s'est passé. L'architecture s'est impregnée des régimes successifs : l'empire Ottoman, l'empire Austro-Hongrois, la Yougoslavie communiste de Tito... C'est l'une des seules grandes villes européennes à avoir dans le même quartier une mosquée, une église orthodoxe, une synagogue et une église catholique.

Clairement une ville à voir, mais si vous y allez, faîtes attention aux petites rues sur la colline...